dimanche 10 mars 2013

Cinq nouvelles épigrammes à l’ancienne


i.
Parti sous d’autres cieux ? A coup sûr : plus cléments.
Ces cieux sont toujours ceux, sereins, où il pleut peu
Tandis qu’ici se couvre, et pisse, et se reprend
Un ciel semblable à tous, soiffeux, incontinent.

Moi, je serais perdu sous un ciel sec, exemple
De vertu sèche, puisqu’à rien en moi ressemble
J’aurais trop honte sous un dais constamment bleu
Je reviendrais vers mes nuages en courant.


ii.
La longue queue sortie d’un élégant trois-pièces
Ce singe est trop savant pour être sérieux
Mais tel chef digne, le costard cachant sa queue
Sautant de branche en branche manquerait d’adresse.

Ni singe ni bouffon, un peu entre les deux
Fort mal frusqué, ne sautant qu’en cas de détresse
J’ignore chefferie, science, et tous leurs jeux
Mais si je tombe ce n’est que sur mes deux fesses.


iii.
Poupin, fidèle à son petit trou de naissance
En attendant que la grandeur vienne vers lui
L’y a trouvée, au prix, bien sûr, d’un grand ennui –
A force, à force... elle s’impose, la présence.

Sous son cul mou, le trou s’est bonifié en trône
Faisant de lui, dessus, une gloire locale
Gloire locale, puis gloire internationale
Conscience universelle, impériale icône.


iv.
Il y en a dont, hélas, le talent ne s’exprime
Que dans le noir, tout s’envole au petit matin
C’est dans la nuit qu’ils brillent, tels des corps célestes ;
Pour un chanteur ça va, un peu moins pour un mime.

J’ai connu un muet dont c’était le destin :
Tous feux éteints il excellait, au jour ces gestes
Paraissaient pour ce qu’ils étaient en vérité –
De simples tâtonnements dans l’obscurité.


v.
Si l’on n’invente rien, on n’est pas inventeur
Et si l’on ne ment pas, on n’est pas un menteur ;
Celui qui clame une invention imaginaire
L’a inventée, son invention, il en est père.

On a prétendu que ses belles inventions
Ne seraient autres que des affabulations ;
Or, tout est vérifié chez mon ami faussaire :
Trouvés par lui tout seul : bobards, craques, chimères...

Début Mars 2013

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