jeudi 31 décembre 2020

Sans pouvoir oublier

Sans pouvoir oublier combien elle est profonde
Je la caresse en jardinant, ta chère tombe.
Ainsi, ma main t’effleure encore, aimante, et passe
Désespérée de n’en fleurir que la surface
Avidement tout le long de ta peau chérie
Et tente de toucher ton cœur enseveli.

30 Décembre 2020

mercredi 30 décembre 2020

La question non posée

Au lit, plus ou moins pris de froid, je redeviens parfois celui
D’avant, du temps de ta présence
Puis je me surprends à vouloir demander ton avis d’experte.
Or, en prenant conscience que
Tu ne pourras répondre, ma question s’envole dans la nuit
Comme afin de t’y retrouver.

Alors, question et celle à qui elle a été posée sans qu’elle
Soit en état de réagir
Se réunissent quelque part au noir mystère du néant –
Le même qui m’entoure ici.
Du coup, ça calme un peu mon désarroi d’être dorénavant
Confit dans mon propre silence.


     Die ungestellte Frage

     Lieg fröstelnd ich im Bett, dann werd ich oft zu dem von früher
     Als du noch bei mir warst
     Dann überrasch ich mich dabei, nach deinem Rat zu fragen.
     Doch merk ich dann, dass du
     Nichts sagen kannst, entschwindet meine Frage in die Nacht
     Wie um dich dort zu finden.

     Die Frage und diejenige, die außerstande ist
     Sie zu beantworten
     Vereinen sich dann irgendwo im rätselhaften Nichts
     Das mich auch hier umgibt.
     Dies tröstet mich in meiner Ausweglosigkeit, der ich
     Im eignen Schweigen schwele.


29. Dezember 2020

mardi 29 décembre 2020

Through the Grapevine

i.

Maintenant que tu es partie, ce sont de drôles
De phénomènes que j’entends parler de toi :
Bestioles sur le mur deviennent messagères

Fins rayons sous les portes, lourds appels.
Tuyaux ronflants, lignes de téléphone.
Pourtant, je reste clairvoyant

Clairentendant
Et clairpensant –
Juste à l’affût, en somme.


ii.

J’ai développé un drôle d’autocontrôle
Maintenant que tu n’es plus là.

Suivre ma pente naturelle me désole :
J’invente donc d’étranges lois.

Pour garder la main sur les choses, je m’enjôle
En me grondant avec ta voix.

Le prix de perdurer est bien ce double rôle
Tant je me sens réduit à moi.


iii.

Maintenant que tu m’as laissé seul derrière la porte
Tel un garçon sage, tout crispé pour entendre
Le fin tintement qui l’autorise à la rouvrir

Un drôle de sentiment m’envahit
Un drôle de je ne sais quoi.

Découvrirai-je, au beau milieu du salon transfiguré, la gloire
De l’énorme sapin constellé des lumières de l’enfance
Avec sa montagne de cadeaux autour du pied ?

Ah, ce sentiment qui m’envahit
Ressemble bien à la peur
De ne plus mériter
Aucune fête.


26 Décembre 2020

mercredi 23 décembre 2020

Si la chimio avait abîmé tes cheveux

Si la chimio avait abîmé tes cheveux
J’ai cependant pu en conserver une mèche.
C’est tout ce que de toi je peux toucher encore.

J’aurais aussi coupé un ongle, prélevé
D’autres rognures, voire un durillon, que sais-je
Pour les mettre à l’abri dans un écrin en or.

Caresser celle qui a dû s’absenter, c’est
Pénétrer dans le rêve de ma Blanche-Neige
Qui, endormie dans son cercueil, défie la mort.

22 Décembre 2020


mardi 22 décembre 2020

Je réagis comme un paysan plaqué

Je réagis comme un paysan plaqué
Surtout soucieux de ne rien chambouler
À la maison, pour que, le jour de ton retour

Tu puisses retrouver les affaires en place
Puis, tes précieuses paperasses
Ensemble avec l’amour ;

Pour que, l’heure de ton retour
Tu t’assoies sur ta chaise en face
Comme de rien, comme jamais partie

Juste, peut-être, avec un indicible tout petit
Sourire en coin réintégrant ton ancien monde.
Espoir de fou ? Mais pas une seconde :

Connaissant où tu gîtes
Je saurais t’y rejoindre à la limite.
Ce jour, nous fêterons nos retrouvailles en silence

Je penserai à peine en ta présence :
Qu’est-ce que t’as bien pu ficher là-bas
Ces longues années, terrée chez les cancrelats ?

21 Décembre 2020

lundi 21 décembre 2020

En attendant la yahrzeit

Désormais, je m’endors la nuit tout seul
Le drap tiré sur moi tel un linceul.
Ce lit est devenu ma tombe à moi
Ressemblant à la tienne dans le froid.

J’ai bien du mal à savoir si je souffre
Du vide ou de ton souvenir béant
Craignant l’oubli, ou désireux du gouffre
Qui, devant moi, m’attire en ton néant.

Je ne prie plus les dieux, mais les déesses
Et fussent-elles sourdes à l’écoute ;
Car même si, elles aussi, s’en foutent
Tournant le dos aux cris de ma détresse
Dans leurs chitons qu’ami Zéphyr froufroute
Elles me font revoir tes belles fesses.

C’est qu’il ne reste pour me consoler
Que le reflet frivole d’un mirage
Image de ton déchirant courage
Des derniers jours du court bonheur volé.

20 Décembre 2020

samedi 19 décembre 2020

Quatrain, Reprise & Coda

Du smegma de l’adolescent / Au phlegme du barbon : / Pris entre deux néants / Bonheur ne vit point long.

i.

Vom Smegma der Adoleszenz
Zum Phlegma alter Knaben:
Das Schöne ist vom Nichts umgrenzt
Das Glück nur kurz zu haben.


ii.

Doch wie sie noch hinter den Gräbern hervorhuschen
Fangerles spielen zwischen Gräbern
Und nicht zu fassen sind
Bleiche, Nebelgestalten der Jugend
Wo doch unten liegt
Was wir geliebt haben
Und nun – selbst auch wortlos und reglos
Und steinern – weiterlieben.


iii.

Warte aber.
Ich muss für uns beide
Nur den Grenzstein noch setzen.


11. Dezember 2020

samedi 5 décembre 2020

Resilienz

i.

Tut dir einmal der Zahn weh
Dann hat der Zahn schlicht Hoamweh.
Dann reiß den Zahn schnell aus
Und schick ihn nach Haus.

Tut dir einmal der Hals weh
Dann friss halt keinen Schmalz meh
Und wisse: Drachensaft
Gibt Rachen Kraft.

Tut dir einmal der Bauch weh
Dann tuts dem Bäuchlein auch weh:
Das will auch sein Vergnügen
Und mag nicht lügen.

Tut dir einmal der Kopf weh
Dann lerne aus dem Kopfweh:
Lass die Gedanken schweifen
Aufn Rest magste pfeifen.

Tut dir einmal der Zeh weh
Dann eil schnurstracks aufs WC.
Drauf scheißen, jemineh
Heilt auch den Zeh.

Tut dir einmal der Schwanz weh
Dann tut er dir nie ganz weh:
Freu dich, was du gehabt
Wenns nicht mehr klappt.

Tut dir einmal der Po weh
Dann tut dir halt der Po weh –
Kurz währt des Rösleins Blüte
Kallipyge Aphrodite!

Tut dir auf einmal nix weh
Dann danke deiner Glücksfee:
Die letzte Medizin
Ist ste-her-bin.


ii.

Ich koche wieder, schreibe wieder
Nur die Gerichte und Gedichte
Schmecken nach Tod, sind Todesfrüchte
Singen vom Tod, sind Todeslieder.


23. November 2020