Il a fallu faire de la place dans la cave pour de nouveaux arrivants. Alors, pris de folie, j’étais d’accord pour non seulement virer le lapin tambourineur, mais également Nono le robot, pourtant capable de dire « Je suis ton copain ». Tout à coup fini le copinage ? Le téléphone à très grands yeux Fisher-Price ainsi que le cheval jaune à selle ouvrable pour y ranger les voitures, je les ai tout de même épargnés. Froid comme une carpe, fiston voulait se débarrasser d’eux aussi. Il approche tout de même de la quarantaine, et ces jouets vivaient leur retraite méritée depuis bien plus de trente ans. Pour lui, ils font partie de la préhistoire ; pour moi, cette préhistoire était hier.
Les jouets ayant été aussitôt récupérés par nos Roms, ne me réjouissais-je pas de les savoir sauvés, promis désormais à faire le bonheur d’autres enfants, peut-être trop pauvres pour avoir accès aux jouets neufs ? Ou, s’ils partaient sur eBay – ils valent cher maintenant – mettraient un peu de beurre dans les épinards gitans ? Non, je suis trop égoïste. Ceux qui ont fait ces cadeaux à mon fils sont tous morts. La voilà, la raison. Mais pourquoi lui, leur véritable propriétaire, n’avait-il nul regret ? Le souvenir de l’enfance importe en premier lieu aux parents. Ils ne dépassent, pour ainsi dire, jamais le stade enfantin de leur progéniture. C’est en ayant des enfants qu’on retombe en éternelle enfance.
Nono le robot sera sauvé à jamais uniquement par ces mots d’un adulte.
J’ai décidé de faire enfin le vide
Et le néant m’a dit bonjour.
Je me suis réveillé sans cœur, livide
Car le néant a parlé à son tour.
Suis-je un robot qui a besoin de preuves
Et ne peut vivre de lui-même ?
Pour être, il faut que souvenir m’émeuve –
Comme lui, j’ai besoin qu’on aime.
29 Septembre 2025
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