Ce vaporisateur n’est pas tout à fait nécessaire, il est, à nos yeux, tout à fait joli. Et il est un caprice. Un caprice de brocante.
On ne peut pas vivre sans caprice, et si l’on n’est pas très riche mais porté sur le joli – ou plutôt : ce que l’on tient pour tel – il ne reste que des caprices de brocante. Dans ce cas, ni le neuf, ni l’antiquité estampillée, n’ont droit de cité dans la demeure.
L’eau de toilette que ce vaporisateur vaporise n’est, quant à elle, point un caprice ; elle est simplement fort bien nommée, ces toilettes s’aérant mal. Or, si ce vaporisateur en est un, lui, ce n’est pas l’action de vaporiser qui se trouve ainsi mise en cause, mais uniquement l’instrument – autrement dit : la façon. On ne discute donc pas le contenu, mais le seul emballage.
Nous en déduisons que celui qui effectue une tâche utile de manière inutilement esthétique est peut-être capricieux, et celui qui ne le fait pas de cette sorte-là n’est peut-être pas très loin de la bête, la bête de somme en somme. Partant de là, nous sommes amenés à penser qu’il n’y a pas beaucoup de choix dans une vie humaine : il y a des décision à prendre lorsqu’il en va de l’art et de la manière.
Être ou avoir ? Qu’est-ce qui fait l’homme, en dernière instance ? Sans doute le second. Car avoir un tel vaporisateur dans les chiottes est, à nos yeux, bien plus important que le fait d’être doté de la faculté de raisonner, ne serait-ce que sur le vapo en question. Les animaux, eux, réfléchissent aussi, mais ils ne savent pas quoi mettre dans leurs trop frustes lieux d’aisance. C’est au moins la réponse que nous nous donnons à la grande question éternelle quand, en nous soulageant, nos regards ne peuvent éviter le petit meuble en bois brut, bricolé main, avec, trônant dessus, un si joli caprice de brocante.
13 Janvier 2016
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