1. Mini-manif
Debout dans le métro, même plein à craquer, instinctivement je me tourne vers les jolies personnes, et quand je dis ‘joli’, je le conçois dans le sens le plus conventionnel. Je ne les embête pas, je ne ressens nul besoin de les toucher, ces personnes bien mises, mais instinctivement je me tourne dans leur direction, comme si j’avais besoin d’être rassuré quant au milieu dans lequel je me trouve. J’ignore si tout le monde fait pareil, mais comme chez moi c’est un mouvement hors de la volonté, il y a peut-être une loi naturelle. En revanche, lorsqu’il s’agit de théories, instinctivement je me méfie des plus attirantes, de celles qui relèvent le plus du maquillage adroit et du prétendu bon sens, pour découvrir une beauté insensée aux plus ou moins biscornues. Pas des contrefaites, je ne suis pas un maniaque, mais celles qui n’ont l’air de rien, ou plutôt l’air de tout le monde, ou au contraire une mine à première vue étrange, pas exactement engageante à vrai dire. Puis après, j’y touche, je les embête pour voir un peu. C’est également hors de la volonté, et pourtant, là, je sais que tout le monde ne fait pas pareil.
Passant le seuil de ma demeure
Je voyais une mécontente
Qui arborait un écriteau :
« Baissez le haut, haussez le bas ! »
Moi, admirant ce joli cœur
Fait de montées et de descentes
Je me suis dit : Eh bien, mon gars
V’là l’injustice qu’il te faut !
« Je veux les deux, moi, haut et bas ! »
Criai-je tel un beau salaud
Pour qui les formes de nos fleurs
Par voie de vice se font saintes.
(Quand beauté compte pour du beurre
L’égalité enfin atteinte
C’est la morale qui aura
Nivelé par le bas le haut.)
2. Contournant leurs crachats
Contournant leurs multiples crachats
Je me dis que c’est le propre
Des hommes inférieurs
De ne jamais se dégoûter de leurs sécrétions à eux
Mais toujours de celles des autres et que c’est
Ça qui les rend si facilement irritables.
L’homme supérieur, en revanche
Se méfie en premier lieu de lui-même
Tout en restant stoïque face aux déjections d’autrui.
Or, cet homme-là est devenu très rare, plus la peine
D’en parler, il a désormais trouvé sa place
Dans les poubelles de l’histoire.
Qui ne se dégoûte de rien n’est ni inférieur, ni supérieur ;
On peut l’utiliser en milieu hospitalier ainsi que
Dans les entreprises d’assainissement :
Vaillamment, il plonge les mains dans les bouches d’égout
Mais il faut sans cesse lui rappeler
De se les laver après.
M’enfin, rien de plus sale
Que celui qui ne se dégoûte de rien.
Voilà le propre de l’homme entre les deux.
3. Des Löwen Los
„Ille etiam Thracum populis fuit auctor amorem / in teneros transferre mares citraque iuventam / aetatis breve ver et primos carpere flores.“ Ovid, Métamorphosen X, 83-85
Da hat der große Mann vor dreißig Jahren
Den Ruhm dazu benutzt, an seinem Schwarm
Von Jüngern rumzufingern, ein Gebaren
Das Orpheus selbst schon nicht so recht bekam.
Die Schuld, die ihn jetzt einholt: damals galt
So etwas als geniales Ungewissen.
Die Zeiten wechseln, und aus jung wird alt
Und alte Löwen werden totgebissen.
Es ist doch letztlich alles gleich geblieben.
Sei, Genius, auf der Hut, solang am Pult
Und was du auch mit deinem Stab getrieben
Vertrau nicht auf der Jüngeren Geduld.
4. Vom Schwein vom Schöpselein
Jüdischer Humor ist nicht, wenn Juden Nichtjuden etwas erzählen, was die zum Lachen bringen soll. Jüdischer Humor ist es, wenn Juden untereinander über etwas lachen. In der Regel entgeht den Nichtjuden, was an solchen Geschichten witzig sein soll. Freilich nicht, weil es ihnen am Humor fehlte oder sie zu blöd wären, sondern schlicht und einfach, weil sie die zum Verständnis nötigen Erfahrungen nicht mitbringen. Jüdischer Humor ist Insiderhumor, und so, wie es Informatikerwitze gibt, die man nur als Informatiker kapiert, oder meinetwegen auch authentische Klempnerwitze, die tatsächlich nur Klempner aufgrund ihrer speziellen Kenntnisse und Berufspraxis lustig finden, so geht es auch beim jüdischen Humor. Er ist nach außen so wenig „vermittelbar“ wie Nichtjuden koscheren Wein trinken können, denn sobald sie den anrühren, ist er nicht mehr koscher. Und das ist keiner jüdischen Bosheit geschuldet, sondern ein uralter Schutz, namentlich auch vor der Verleumdung, dass Juden Christenblut zu trinken pflegen. Es würde zu weit führen, das sehr komplizierte Regelwerk in Bezug auf den gemeinsamen Weingenuss von Juden und Nichtjuden genauer auszuführen – der Horror vor der christlichen Eucharistie spielt noch mit herein – und ich bin dazu auch keineswegs in der Lage, doch dergestalt ist auch der jüdische Humor geschützt vor dem Verständnis von Nichtjuden. Was allgemein so unter seinem Namen läuft, gehört ins Feld der Beschwichtigungsliteratur.
Der absolut schweinigste Schinke hienieden
Ist koscherer Schinke, erst der koschere schmeckt
So nach Schwein, wie es keinem Schwein jemals beschieden –
Nu, weil nicht mamesch a Breckele Chaser drin steckt.
Bloß wer sicher kann sein, dass das schweinigste Schwein
Auf der Weide ein blökendes Schöpsele war
Take bloß der, mirtzeschem, bloß ein solcher allein
Hat noch einen Begriff von dem, was falsch ist und was wahr.
Eine Welt, wo es jeder für gottgegeben nimmt
Dass keiner mehr weiß, von woher eppes stammt
Und nebbich bloß wahr ist, was awade nicht stimmt
Solch ein Ojlem ist zum ewigen Fortschritt verdammt.
[Ce n’est pas de l’humour juif lorsque des Juifs racontent à des non-Juifs des trucs qui doivent les faire rire. L’humour juif c’est quand des Juifs rigolent entre eux d’une chose. Si, en règle générale, les non-Juifs ne comprennent pas ce qui est censé être drôle dans de telles histoires, ce n’est pas parce qu’ils manquent d’humour ou sont trop bêtes, mais parce qu’ils ne disposent pas des expériences nécessaires à leur compréhension. L’humour juif est un humour d’insiders. Et comme il y a des blagues d’informaticiens qu’on ne pige qu’en tant qu’informaticien, ou d’authentiques blagues de plombier que ne trouvent donc drôles que les autres plombiers parce qu’ils ont le savoir et le vécu correspondants, ainsi en va-t-il de l’humour juif. Il est aussi peu communicable qu’un non-Juif est capable de boire du vin cacher, car ce vin, dès qu’il le touche, cesse de l’être. Et ce n’est pas dû à une quelconque méchanceté de la part des Juifs, mais à un très ancien mécanisme de protection, notamment de la diffamation que les Juifs ont l’habitude de boire le sang des Chrétiens. Je ne veux ni ne peux m’étendre sur la législation très compliquée qui règle la consommation commune de vin entre Juifs et non-Juifs – y intervient aussi l’horreur de l’eucharistie chrétienne – mais de la même façon l’humour juif est protégé de la compréhension des non-Juifs. Ce qui passe couramment sous ce nom ne relève que du domaine de la littérature d’apaisement.]
8. Januar 2019
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