lundi 26 octobre 2009

L’homme qui n’a pas vu

L’homme qui n’a pas vu la merde
Ne saurait chanter la merde.
La merde est partout, mais peu l’ont vue.
Vue avec leurs propres yeux, voui.
Vue avec des yeux de poète, non.

Alors, vas-y ! me dis-tu. – Je ne puis.
Vue avec mes propres yeux, voui.
Vue avec des yeux de poète, voui.
En mesure de la chanter, non.
Trop de scrupules.

Comment ça, trop de scrupules ?
Face à la merde ?
– Ce n’est point envers elle
Qu’en tant que poète je scrupule ;
Je pense bien pouvoir en louer la beauté.

Et cela te gêne-t-il ? – Un peu.
Mais pas non plus à cause de mes frères piétons.
Cela me gêne par rapport au trottoir
Que parfois je me suis permis de chanter
Bien qu’il soit caché sous la merde.

21 Octobre 2009, Ceteri egoque, 13

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