lundi 15 décembre 2025

Erlösung von allem Übel

Wer erst das Weltgesetz wagt zu missachten
Und dafür Recht und Unrecht neu erfindt –
Er ist so keck... ach, wehen tut der Wind
Woher er muss, mag’s tagen oder nachten!

Wie fein er’s auch geplant, misslingt es doch
Schlupfte auch nur ein Sandkorn ins Getriebe
Und er, umstellt von der Gesellschaft Liebe
Zur Läuterung fährt ein ins finstre Loch.

Dort lässt er sich allmählich sanft bekehren
Denn keiner widersteht des Himmels Reiz
Weil Schilf sich besser biegt, und Gier und Geiz
Vermählen sich – kein Kampf kann ewig währen.

Und kommt er frei, dann freilich folgt die Straf
Für alle Missetat: der Schuft wird brav.

8. Dezember 2025

vendredi 5 décembre 2025

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jeudi 4 décembre 2025

Petit mouchage

תוכחה מזבובון

i.

“I am speaking now / the way you do. I speak / because I am shattered.”
                                                                                                               Louise Glück

Notre vie semble un peu plus longue
Que celle d’une fleur
Ou de nos petits camarades virevoltants
Mais est-elle plus riche sous le soleil ?
A-t-elle plus de sens ?

Nous sommes sans doute meilleurs
Quand il s’agit de justifier
Convaincus de les surclasser en mémoire...
Sauf que la mémoire n’est pas la vie
Elle en est presque la négation
Elle en est l’après-goût –
Et, en tout cas, celle de la nature
Dépasse la nôtre très facilement
De quelques millions d’années.


ii.

“All summer I heard them”
                        Stanley Kunitz

J’ai trouvé une mouche toute fine dans la baignoire.
Elle ne s’était pas noyée
Elle est morte de sa belle mort naturelle
Car l’hiver est déjà là
Et ce n’est pas la peine d’attendre le printemps
Lorsqu’une seule saison suffit au bonheur.

Ce serait trop dire que j’étais jaloux d’elle
Moi qui attends toujours le prochain printemps
Et même au printemps, celui à venir
Mais quand le tourbillon l’a emportée
Comme si elle ne valait rien
J’ai vu le tragique brusquement changer de bord :
Je suis si lourd ; elle, par contre, se déployant dans l’eau –
On aurait pu la prendre pour le pétale d’une fleur.


iii.

“my grandmother’s grave / like a loaf”
                                                Linda Pastan

Il faut se contenter de ce qu’on est.
C’est une tâche plus ardue pour un humain
Que pour une fleur ou un animalcule
Et pas seulement à cause de la lourdeur.

Quand la mort nous fauche
Trop longtemps nous resterons présents
Trop longtemps nous restons poids
Désormais poids mort
La légèreté étant aux autres
À ceux qui ne la soupçonnent même pas
Aux justes qui fourmillent ici-bas
Voletant ou fleurissant
Tandis que nous, avec nos airs supérieurs
Nous en comptons au mieux trente-six parmi les nôtres.


3 Décembre 2025

mardi 2 décembre 2025

Entitlement

“Gulls / loudly insist on indefensible rights”
                                                          J. Schuyler

Their baby faces spout off rights by birth.
I hold that they derive from he who loves
And otherwise must be deserved, dear doves –
Entitlement comes merited on earth.

Unlike your cheek, true panhandling opposes
But isn’t mainstream-backed facility
With claims convenient to conformity:
You are no gulls, girls, flight of spineless roses!

Would it be fair to leave it to your skill
And trust your charm to get things rightly done
Ready to substantiate what both fulfill?

The cause it’s all about has long been won.
Fancy a fight? Just pick another one
Without complaining, and no overkill.

December 1st, 2025

mardi 25 novembre 2025

Les éléments

1. Interdépendance

Der kluge Nagarjuna fand heraus, dass ohne die Möglichkeit des Feuers Brennholz kein Brennholz, sondern höchstens Holz wäre. Ein ganz und gar marxistischer Gedanke des buddhistischen Kirchenvaters aus dem zweiten Jahrhundert. Was lernen wir daraus? Wäre Holz nicht eventuell brennbar, gäbe es kein Holzfeuer, sondern höchstens Feuer, und ohne groß den Geschmack zu bemühen, den sowieso nur die geübteren Zungen bemerken, hätte auch die bessere Margherita einen geringeren Tauschwert.

Si je réclame de l’air
Je ne constate pas que c’est du vent.
Du vent, à la limite, est préférable à du solide
Lorsque tu ressens le besoin d’un peu plus d’air.
En philosophie, c’est la même chose.

Le béton s’avère trop étanche
Si bien que l’air y demeure confiné :
S’il faut le percer pour que le vent passe
Et l’air circule, facilitant ainsi la combustion
Il vaut mieux s’arrêter avant la déconstruction totale
Qui t’enlève tout matériau pour qu’il ne te reste que du vent.

Rien de plus futile qu’une philosophie qui n’est que poésie
Et poésie médiocre, grammatologique
Mondaine, propos de table amusant
Philosophie entre la poire et le fromage
Et mentale seulement de par ses trous.


2. Stabilité

De mon métropolitain de strapontin, pas plus tard qu’avant-hier j’ai vu un homme bousculer une femme pour monter en premier. Quel malotru ! me suis-je dit. Mais non : cette femme était la sienne. Une fois la barre gagnée, la dame a parlé très gentiment à monsieur installé avant elle. Malotru pour les uns, mari pour les autres. Le progrès a du mal à y changer quelque chose.

On prétend désormais
Que sans équilibre parfait la vie se transforme en enfer
Et que même, il a le droit de pencher pas mal, cet équilibre obligatoire
Pour peu que ce soit du bon côté, réparateur d’injustices.

Je constate que
Seulement un équilibre parfaitement imparfait
Jusqu’à présent nous a permis de survivre en beauté
Et s’il penchait dans le temps carrément du mauvais côté
Enfin... pas grave.

Or, désormais on prétend –
Et c’est cette prétention, il me semble
Néfaste comme elles le sont toutes
Qui siffle la fin du bonheur.

Sauvons ce qui peut encore l’être.
Essayons de survivre dans l’injustice, sans prétention.


23 Novembre 2025

[De par ses trous]

mardi 18 novembre 2025

Sadhu

1. Avec Berryman

“I saw nobody coming, so went instead.”
                                           Henry’s Confession

Il n’est pas sûr que ce quote
Ne soit pas un requote. Dans la vie
Tout tourne donc et te revient à la figure, genre Nietzsche.

Si personne ne s’approche
Willy-nilly, faut s’approcher des personnes.
Même si ce n’est pas l’idéal, point de vue dignité.

I saw nobody dangling, so
I hung myself to help flower the tree –
N’est pas une incitation au suicide, mais un conseil de survie.

Être snob ne signifie pas
D’avoir un surplus criminel d’amour-propre
Mais de se promener tel un sadhu, dignement trois quarts à poil.


2. Ethos

Vor der Heiligsprechung muss man zuerst einen Prozess über sich ergehen lassen, mit Anklage und Verteidigung. Wem Gerichtsverfahren – und speziell solche mit Prüfung der Moral – zuwider sind, der sollte sich besser nicht darauf einlassen, es geht ja auch ohne. Wer den Prozess jedoch gewonnen hat, der bekommt seinen Feiertag, allerdings selten für sich alleine. Bruchstücke seines Skeletts werden ausgestellt und heilen wildfremde Menschen. Hat er was davon? Nun, die Ehre, nehme ich einmal an. Ich bin kein Heiliger, und dennoch kann es passieren, dass man sich an mich wendet, wenn jemand in der Bredouille ist. Doch ich muss Fürbitten eisern ablehnen, falls sie nicht vom eigenen Nachwuchs kommen. Wäre ich heilig, würden gute Worte genügen. Unheilig müssen sie aber auch genügen. Es macht insofern keinen Unterschied. Ich frage mich, worin der Witz bei der Heiligkeit besteht, oder vielmehr der Nutzen. Kein verständiger Mensch strebt die damit einhergehende Verantwortung an. Kaum erstaunlich, dass erst heiliggesprochen wird, wer sich nicht mehr wehren kann.

Is it enough to sit and wait with nothing but
A string around one’s loins (for basic decency)
By holy waters to... turn ethical on earth?

Churl, hear it out, my scanty piece for what it’s worth:
Just strip and join the river, wait and see;
Do psalmodize – or keep your trap forever shut!

Is it the song and not the string that hones the soul?
Thou nincompoop: Where are the deeds?
Should saintliness not have an aim?

That’s what the nameless claim.
Or don’t ye dullards know how few it needs?
It’s in the books that, challenged, Parvati became a ghole.


3. Furor

Le débraillé des uns est le saint des autres. Le chic saint est donc le débraillé. Puis cet autre, plus dans le classique : celui des minets. L’autre jour, une fois de plus, rive gauche j’ai vu passer un vrai moine, très smart. Autour de St-Sulpice, certains jours d’été ils se mettent à pulluler, faisant leur mannequinat sacré. Quelles têtes de bure ! C’est fini, bien sûr, but not in a whimper – plutôt en cover boys des Inrocks ou du Têtu.

Hättst du dich aufgebrezelt, wärst
Du Narr jetzt auch was wert
Nur geht nicht, dass man sich zuerst
Verhüllt und dann beschwert.

Einer von sechsunddreißig, ja –
Die Welt hält wegen dir.
Ohne dich wär sie nicht mehr da...
Doch dafür gäbs dich hier.

Man kann schwer haben Welt und sich
Und wer es beides will
Muss Trommeln rührn und gleichzeitig
So tun, als sei er still.

Du sagst dir: Dann noch lieber tot
Solangs nur weitergeht
Und zehrst von jenem Gnadenbrot
Das keiner je verschmäht.


19. November 2025

dimanche 16 novembre 2025

Le treize du mois

– Et le feu sacré alors ?
– Celui qui tient à hâter la descente du paradis sur terre
En ravageant les rangs des sceptiques ?

Celui qui, incarné en homme, le long des siècles
Transformait le paradis terrestre en enfer ?
– Oui, c’est de ce dieu noir que je te parle.

Il y a des retardataires, non ?
– Ce sont des faibles d’esprit.
– Certes, mais cherche à les convaincre et tu verras leur force.

– Tu ne persuaderas jamais un fou de sa folie
Car il a l’empire du ciel de son côté, comme les nôtres.
– Mais c’était dans des temps bénis.

– Et tu penses qu’elle est finie, la toute-puissance des bénédictions ?
Tu n’as jamais eu d’apparitions, toi.
Voilà pourquoi tu ne peux rien contre eux.

– Faut-il comprendre le feu pour le rendre inoffensif ?
N’a-t-on pas réduit les prophètes au silence
Uniquement parce qu’on ne les comprenait plus ?

– Pourtant, il vaut mieux le connaître, leur feu.
– Mais du coup, il peut nous contaminer ?
– C’est le prix à payer pour avancer dans la nuit.

14 Novembre 2025

lundi 10 novembre 2025

Plot Visit

Where are you now, life’s rustling energies?
Frills to one’s skeleton, or sketch: bereft
The tree looms truer. Some rash flurry’s theft
Or autumn’s grudgeless rape? Grim reaper, breeze?

Its nest long empty, of extinguished fire
Mute beacon to the end, it stays a dark
Enduring signal, naked to the bark
Devoid of banter – strong with new desire.

Upright I stand, on my own plot, brought flower
To future use, all morbid egotism
Unburdened maple, waiting, lonely, power
An image of myself... a narcissism.

No symbol ever tells one’s hour or place
Yet I must recognize a mirrored face.

November 10, 2025

samedi 8 novembre 2025

Fête des morts

i.

On fréquente aussi con que soi
C’est entouré d’eux qu’on se sent bien
Et l’on croit que cette foule de fréquentations
Confère le savoir et la sagesse. Grand-mère par contre...

Même ma mère
Pourtant bien plus mûre
Ne passait pas des heures avec elle.
La plupart du temps, l’aïeule restait seule.

C’était sa faute à elle
Car son amour incommensurable
N’allait pas sans conseils d’ordre pratique –
Trop soucieuse, elle ne pouvait pas s’en empêcher.

Celui-là n’aime pas les conseils d’ordre pratique
Que je ne puis me retenir de lui prodiguer
Dans mon amour incommensurable
Et il se barre vite fait.

Je lui pardonne d’avance.
Un jour, je le sais, il regrettera, lui aussi
Et finira souvent seul
En pensant aux chers morts.

L’amour qui nous unit à nos vieux
De tout temps, nous ne pouvons le montrer
Que trop tard, le donnant aux jeunes
Lorsqu’ils ne le méritent pas encore. C’est bien justice.


ii.

Tard au lit, j’écoute la radio.
Une rediffusion de Mozart, grand-mère
Aurait pu l’entendre
Lors de la première fois
Car elle date de son vivant.
Aurait-elle apprécié Mozart comme moi ?

J’en suis convaincu. Dans le cas
De Dionne Warwick, passant après
C’est moins sûr. Les expériences diffèrent.
Celles responsables du goût, oui, mais pas celles de la vie.
Or le goût, lui, n’est dû qu’aux épices
Qui camouflent la nature brute de l’aliment.


iii.

Je me replonge dans Le Rameau d’Or de Frazer
Quatre volumes de neuf cents pages –
Cela fait bien trente ans que je n’y ai pas remis le nez
Et je n’en ai jamais lu plus que de courts extraits
Choisis selon l’envie du moment

Mais... je me rappelle de ce que je lis
J’ai dû encore tomber sur les mêmes chapitres.
Une génération passe, mais la main qui feuillette
Garde ses habitudes – on ne
Vieillit jamais, dis donc. Alors tout ce que je viens d’écrire...


7 Novembre 2025

samedi 1 novembre 2025

De la véritable poésie

“Home in Missoula,
Home in Truckee,
Home in Opelousas,
Ain’t no home for me.”

                           Jack Kerouac

  1. Thèse

Je rencontre des gens venus de très loin
Qui me racontent leurs histoires
Histoires de coins exotiques, jamais visités
Mais je les connais déjà
Je les ai entendues au moins cent fois
En vérité, elles se répètent.

Comment se fait-il qu’arrivant de contrées
Tout à fait inconnues
Ils me causent toujours de choses connues ?
Serait-ce dû à mes oreilles
Devenues sourdes à la sidération
Ou ces rivages si lointains
N’auraient-ils plus rien d’épatant à offrir ?
Serait-ce l’âge ?


2. Antithèse

Quand j’attends la nouveauté
Elle me pose un lapin.
Quand, inopinément, elle tape à ma porte
C’est une mauvaise nouvelle.
Serait-ce l’âge ?


3. Synthèse


Soyons plus positifs, car
Cela ne sert à rien de ne pas l’être.
Prétendons que tout connaître
Est le résultat d’une vie bien remplie
Et que les mauvaises surprises
Signalent juste que la vie continue.

Pour nous rassurer
Constatons donc ceci :
Sans aléas désagréables
Pas de véritable existence, mon gars
Et sans la merveille rétive
Pas de véritable poésie.


30 Octobre 2025

samedi 25 octobre 2025

Fairy Tale

                              In memoriam

When you met Fair, by any chance
She came to disappear:
Where love is lurking, witches dance
Luck is a bitch up here.

What did it whisper while she seemed
To linger on your smile?
All what you might have lived or dreamed
Stayed for a spell... awhile.

Since Fair was singled out for you
The Fiend made ring the bell.
No crystal shoe spoke ever true
Even if it fitted well.

October 24, 2025

vendredi 24 octobre 2025

Modèles de genre

1. La sorcière

La sorcière est soit très moche soit très belle –
Voilà le propre de la sorcière.
La moche est vieille, la belle jeune
La moche est une voisine sans nom qui fait peur
La belle, de passage, se nomme Esmeralda la Gitane et fait envie.
Pourquoi le diable ne prend-il pas entre les deux
Pourquoi pas de choix plus discret ?
Eh bien, il faut que la sorcière fasse quelque chose :
Peur ou envie, en s’en branle – pas de sorcière
Sans génie propre. Le diable a du goût, quoi.
S’il t’honore de ses avances, femme
Ne lui refuse pas ton cœur.
Le féminisme, c’est vrai, est une alternative
Mais sans la sorcellerie, pour celles
Entre les deux, la masse.
C’est pour ça qu’il exige des quotas.


2. L’exorciste

L’exorciste est un homme de bonne réputation. Son côté
Sulfureux, il ne le doit qu’à son savoir-faire, il lui est extérieur.
Il exerce une profession un peu spéciale, ça oui
Mais c’est quelqu’un d’ordinaire.
Il n’existe point d’exorciste de génie
Comme il peut y avoir de savetier de génie, non pas
En raison des godasses, mais génie en dehors de son métier.
Génie de métier, pourtant cela se trouve aussi – chez le
Comptable ingénieux, par exemple, celui qui finit en taule.
L’exorciste, trop raisonnable, n’appartient pas à cette race
Car il n’est pas tellement sorcier
De faire un bon inquisiteur, cela s’apprend.
Voilà pourquoi le diable le méprise :
Ce nigaud n’est même pas plus fort que lui, son démon –
Il a besoin de violence, de tortures, de mises à mort
Pour arriver à ses fins.


3. Le diable

Toi qui n’es ni homme ni femme
Malgré ton apparence
Car les cornes ne te transforment pas en mari
Et ton raffinement ne te fait pas femme
Toi, l’hermaphrodite, le hors-genre
Avec ton pied bot, tare sublimée, rachetée
Toi, le diable, que fais-tu encore parmi nous ?
Pourquoi n’es-tu pas allé en ville
Où des comme toi ont la vie meilleure ?
Pourquoi ce vilain conservatisme chez toi ?
Crois-tu peut-être que tu es mieux en enfer ?
Si tu penses qu’en bas tu es chez toi, mon trésor
Détrompe-toi : Tu as ton avenir devant toi
Il est radieux, fait de modernité
Ton monde n’est jamais celui du passé
C’est celui à venir.


23 Octobre 2025

jeudi 23 octobre 2025

Krankenbesuche

“The world is blanketed with foregone deaths,
small beads of ego, bright with appetite”

                       Updike, Hospital, in: Endpoint


1. Orangen

Ich erinnere mich aus meiner Kindheit, dass
Man bei Krankenbesuchen Orangen mitbrachte;
Und falls nicht, dann eine Flasche Hohes C.
Die schien man nur für Krankenbesuche herzustellen.

Ich erinnere mich an die Mischung
Von fadem Krankenzimmer und Orangenduft
Doch habe nie Kranke, die man damit beglückt hatte
Diese Orange essen sehen, sie hatten nie Hunger.
Kein Wunder, der weiße Raum war überhitzt und roch nach alt.

Besucher und Kranke waren sehr wohlwollend zueinander
Niemals Widerspruch, das musste die Krankheit machen;
Und hatte jemand den Kranken zuvor Schokolade geschenkt
Lag sie auf dem Tischchen hinter der Orange – das fiel mir auf –
Und irgendwann kam der Augenblick, an dem ich gefragt wurde
Ob ich nicht davon wolle. Ich dürfe gerne. Man ging
Davon aus, dass Kinder stets Lust auf Schokolade haben
So wie damals die Handwerker Lust auf Bier.
Ich kann mich aber nicht daran erinnern, jemals mit Genuss
Die Schokolade in einem dieser Zimmer gegessen zu haben
Nie war mir gemütliche Wärme so unangenehm
Es ekelte mich beinahe an.

Ich wusste noch nichts über Krankheit, oder nur
Dass man zu Kranken immer lieb und etwas leise sein muss.
Auch die Kranken selbst waren ja immer lieb und etwas leise
Oft viel lieber und leiser als solange sie gesund gewesen waren.
Das Kranksein machte sie geschmeidig, ja seltsam dankbar:
Die Orange hätte ich gegessen, wäre sie mir angeboten worden.
Garantiert schmeckte sie hier weniger sauer als anderswo.


2. Wirksame Medizin

Man wird nicht einfach so krank, auch das wusste man früher.
Gestern noch kerngesund, und heute darniederliegend
Die herbeigerufenen Barbiere waren hilflos –
Es musste jemand dahinterstecken.

Selbstverständlich wandte man sich dann an den Fachmann
Und erfahren, wie er war, fand er bald die Schuldige.
Erst spielte er ein wenig mit der oft jungen
Und bildschönen Hexe
Wie die Katze mit der Maus
Aber endlich wurde sie, teils immer noch recht
Ansehnlich, an einen Pfahl gebunden und angezündet.
Trotz teuflischer Hilfe überlebte sie das nicht
Und der Kranke wurde sofort gesund.

Nachdem er der Kirche ein Votivbildchen gespendet hatte
Verstarb er in Eintracht mit dem Himmel.
Doch wer kennt noch solche Kunst?


21. Oktober 2025

[Heilungs-Prozess]

mardi 21 octobre 2025

Petite démonologie

Quant aux Juifs, par exemple, on disait pendant des siècles – Werfel s’exprime également en ce sens – qu’on pouvait faire d’eux n’importe quoi, sauf des guerriers. Les Juifs ont pris cela à cœur et sont maintenant des guerriers, et même parmi les meilleurs, mais cela ne convient toujours pas. Ce qui un jour fut dans la tête de l’ennemi y   reste.

Les temps ont changé – on
Prétend désormais
Qu’il n’y ait pas de diable.
Même les dignitaires catholiques le disent.
Encore l’un de leurs mensonges.

Bien sûr, il y a un diable, évidemment
Il y a toujours eu des instances pour pactiser avec lui
De bonnes gens pour avoir des rapports sexuels sataniques
Sauf que ce n’étaient jamais les sorcières
Mais les inquisiteurs
Jamais les hérétiques ou autres libre-penseurs
Mais les papes en personne.
Sinon, les bûchers ne seraient pas explicables.

Autrefois
Ils avaient bien senti les choses
Ils n’étaient pas aussi naïfs que les contemporains ;
Seulement avant, ils mentaient sur les personnes
Et maintenant, ils mentent sur le diable.

 

Kleine Dämonologie

In Bezug auf die Juden hieß es beispielsweise über die Jahrhunderte – auch Werfel äußert sich dementsprechend – man könne alles aus ihnen machen, nur keine Krieger. Die Juden haben sich das zu Herzen genommen und sind nun Krieger, und sogar unter den besten, aber schon wieder ist es nicht recht. Was beim Feind einmal im Kopf war, das bleibt.

Die Zeiten haben sich geändert – man
Behauptet jetzt
Es gäbe keinen Teufel.
Selbst die katholischen Würdenträger sagen das.
Eine weitere ihrer Lügen.

Selbstverständlich gibt es einen Teufel, natürlich
Gab es stets Instanzen, die mit ihm paktierten
Brave Mitmenschen mit einem satanischen Geschlechtsleben
Nur waren das nie die Hexen
Sondern die Inquisitoren
Nie die Ketzer oder Freidenker
Sondern die Päpste höchstpersönlich.
Sonst wären die Scheiterhaufen unerklärlich.

Früher
Hat man diese Dinge deutlich gespürt
Man war nicht so naiv wie unsere Zeitgenossen;
Sie haben damals eben nur über die Personen gelogen
Und heute lügen sie über den Teufel.


A Brief Demonology

For centuries, it was said of the Jews – even Werfel spoke in that vein – that you could make anything of them except warriors. The Jews took this to heart: now they are warriors, among the finest, but that still doesn’t please. Once an idea has lodged itself in the enemy’s mind, it stays put.

Times have changed – now
People claim
There’s no such thing as the devil.
Even the Catholic dignitaries say so.
Just another of their lies.

Of course there’s a devil, obviously
There have always been actors striking bargains with him
Respectable citizens leading satanic sex lives
Only it was never the witches
But the inquisitors
Never the heretics or free-thinkers
But the popes themselves.
Otherwise, how do you explain the stakes?

Back then
Folks could feel these things
They weren’t as gullible as they are today;
They only lied about those involved
And now they lie about the devil.



October 20, 2025

jeudi 9 octobre 2025

Rencontres

1. Rencontre avec l’animé

J’ai vu ce visage
Buriné par le soleil
Ciselé par les voyages
Se lisser dès qu’un sourire l’effleurait.
C’était joli comme effet
Mais il n’y avait pas d’étincelle
Ni de larme dans le sourire
Tout restait contrôlé et sec –
Finies les grandes vacances.


2. Rencontre avec l’inanimé

Si l’on peut demander une chose aux choses
C’est bien la mémoire.
Tu leur dis : Souvenez-vous ! et elles se souviennent
Mais si tu leur dis : Oubliez-moi ça ! elles font la sourde oreille.
C’est bizarre, une chose qui n’exécute que la moitié
Des ordres qu’on lui donne, une chose qui
Face à toi, n’en fait qu’à sa tête ;
Alors, tu la menaces :
Si c’est comme ça, je me débarrasserai de toi. Tu ne
Peux rien contre ça, pauvre chose. Pourquoi es-tu si têtue ?
Et la chose, naïvement, te répond : Mon souvenir m’en empêche.
Une fois de plus, elle t’a damé le pion.

Les puissances de la terre, si l’on peut, on les ensorcèle
Mais on ne les harcèle pas.

 

3. Rencontre avec les deux

Matière morte ou vivante ?
Mémoire, oui. – Morte.
Petit sourire, si. – Vivante.
Politesse, oui. – Morte.
Résistance, si. – Vivante.
Difficile de savoir
Auquel des royaumes la matière appartient
Quand elle est de la rencontre.


8 Octobre 2025

mardi 7 octobre 2025

On Perspective

Dans sa jeunesse, entrevoir la beauté le rendait malade. Littéralement.
Puis, il a eu de la chance, il s’est habitué à elle.
Aujourd’hui, endeuillé, il se dit qu’elle est derrière lui.
Mais lorsque, telle une pluie d’automne, elle se remet brusquement à battre contre sa fenêtre, il se redécouvre des faiblesses. Croire pouvoir s’en passer ne signifie donc pas qu’il soit vacciné à vie. De nouveau, il se fait avoir comme un bleu. Seulement, il est moins ébranlé qu’autrefois. Un peu patraque, rien de grave. La bouche vaguement sèche, l’estomac un tantinet dérangé : l’ancienne maladie n’a plus que l’allure d’une banale gueule de bois. Et pourtant, quelles perspectives !


It smells like frailty of the soul
But isn’t it that time and space
Are once again inclined to meet?

Man’s nature is a cosmic hole
That waits for one more day or place
To be restored with lion meat.

Weakness or strength – heart, brain or feet?
What drives your journey on to face
New life, if not flawed self-control?

October 7, 2025

mercredi 1 octobre 2025

Nono le robot

Il a fallu faire de la place dans la cave pour de nouveaux arrivants. Alors, pris de folie, j’étais d’accord pour non seulement virer le lapin tambourineur, mais également Nono le robot, pourtant capable de dire « Je suis ton copain ». Tout à coup fini le copinage ? Le téléphone à très grands yeux Fisher-Price ainsi que le cheval jaune à selle ouvrable pour y ranger les voitures, je les ai tout de même épargnés. Froid comme une carpe, fiston voulait se débarrasser d’eux aussi. Il approche tout de même de la quarantaine, et ces jouets vivaient leur retraite méritée depuis bien plus de trente ans. Pour lui, ils font partie de la préhistoire ; pour moi, cette préhistoire était hier.
Les jouets ayant été aussitôt récupérés par nos Roms, ne me réjouissais-je pas de les savoir sauvés, promis désormais à faire le bonheur d’autres enfants, peut-être trop pauvres pour avoir accès aux jouets neufs ? Ou, s’ils partaient sur eBay – ils valent cher maintenant – mettraient un peu de beurre dans les épinards gitans ? Non, je suis trop égoïste. Ceux qui ont fait ces cadeaux à mon fils sont tous morts. La voilà, la raison. Mais pourquoi lui, leur véritable propriétaire, n’avait-il nul regret ? Le souvenir de l’enfance importe en premier lieu aux parents. Ils ne dépassent, pour ainsi dire, jamais le stade enfantin de leur progéniture. C’est en ayant des enfants qu’on retombe en éternelle enfance.
Nono le robot sera sauvé à jamais uniquement par ces mots d’un adulte.


J’ai décidé de faire enfin le vide
Et le néant m’a dit bonjour.
Je me suis réveillé sans cœur, livide
Car le néant a parlé à son tour.

Suis-je un robot qui a besoin de preuves
Et ne peut vivre de lui-même ?
Pour être, il faut que souvenir m’émeuve –
Comme lui, j’ai besoin qu’on aime.

29 Septembre 2025

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mardi 16 septembre 2025

Kintsugi

“Shelf life’s a bore”
        Shortcomings 3, 2013

Ce que tu casses, tu le répares.
Suivant ce sain principe, il a passé
Du temps à réassembler le puzzle des pièces
Du grand vase persan, à poissons, pour le ressusciter
En les recollant, avec patience, d’un fil d’or, à la japonaise.
Sa relation avec sa propriétaire n’a pourtant pas pu être sauvée.

Si le tracé du fil d’or suit une ligne semblant aléatoire
Il n’y a pas de hasard, tout ayant sa logique
Tout accident obéissant à des lois
Qui sont juste imprévisibles.

L’or marque cette fausse contradiction
Du sceau de sa préciosité.

Un océan sépare désormais les anciens amants
Entre eux nagent, en effet, les poissons
Séparés par un énorme fil d’or.

Pour le moins, elle l’a emporté
Avec elle, le vase réparé
En souvenir éternel.

Entourés d’objets fragiles
Mais réparables avec art et patience
Il nous faut parfois tout casser pour demeurer.


15 Septembre, 2025

jeudi 11 septembre 2025

Trajectoire et son inversement

“obnoxious to a glum beyond tears”
                                                    Auden (typically dead at my age)

Tout s’alourdit et s’épaissit
Pas seulement la chair, aussi
Cœur assagi qui perd en foi.

Frère jumeau, mon ancien moi :
Comprends-tu qu’il en soit ainsi
Et le déplores-tu? – Mais si

Mais si, je suis encore assez
Moi-même... Plein s’est effacé
Mais sous la cendre attend un môme

À la mémoire en palindrome
Et au chemin pareil, tracés
Futur, présent, et puis passé.

10 Septembre 2025

lundi 1 septembre 2025

Ghundagardi

En ourdou, on s’amuse parfois à affubler les mots d’un genre en les maquillant avec des lettres fantaisistes, supposées leur donner un air exotique, si possible persan — mais pas n’importe quel persan : du persan arabisé, encore plus chic. Imaginez, en français, qu’on écrive automobyle pour signaler avec un « y » ridicule son origine gréco-latine.
Les gens cultivés voient aussitôt la ficelle et le peuple n’y prête pas attention ; ce sont les Halbgebildeten – ceux qui ont juste assez d’éducation pour être snobs – qui en raffolent. Et puisque ce sont eux qui tiennent l’administration, ils réussissent à transformer ces enfantillages en norme officielle.
Pour quel public écrit-on ? Voilà une question que les poètes n’aiment pas se poser, y compris les pataphysiciens. Alors on rigole, un peu gênés, puis on détourne le regard.

Knowledge is useless when we talk
About the gains of being bright
But it proves useful when it’s all
About the benefits of light.

The poet’s torch illuminates
A kind of prehistoric grotto
Where folk in furs worshiped a beast
Foreshadowing the saints of Giotto.

We have more knowledge than they had
Of how things made-up come to be
But in full darkness they allowed
Their newer eyes... to shine and see.

August 31, 2025