1. Du sexisme en sommeil
Parfois, il faut annoncer les choses comme elles sont, il faut admettre ses exploits, les taire serait simplement inexcusable.
Je me réveille, j’ai rêvé plusieurs poèmes, et contraint par ma recherche de la vérité, je note vite fait ce que je peux du dernier. Pour les autres, c’est fichu, je les ai déjà oubliés. Voici le maigre résultat de mes courses :
« Il y fait souvent froid, même qu’il neige
On s’y caille le cul, bon bah, j’abrège :
Non, on ne vivra pas dans un chalet
Et si, chamoise, tu as du regret :
En plein hiver, on peut même à Paris
S’enrhumer du pétard, je te parie. »
Eh ben, ça vaut ce que ça vaut, pas grand-chose à vrai dire, en plein jour c’est décevant. En plus, le côté machiste du truc, voire son caractère vaguement sexuel, m’incommode maintenant. Mais il a été composé dans l’inconscience, tout de même, et je me souviens encore de l’effort, considérable, porté sur la rime, et surtout le sens, élément pas facile à obtenir lorsqu’on dort à poings fermés. Par chance, tu étais toujours là d’une certaine façon et la vie était belle. Rien que du beau songe alors. La pureté de l’illusion, ça justifie, non ?
2. Victime inclusive
La qualité préférée de notre époque plutôt lâche est celle de la victime. Tout le monde veut en être. La victime est le vrai héros du temps présent. Elle le devient immédiatement en insistant sur son statut victimaire. La seule condition un peu gênante est de se faire connaître dans toute sa splendeur. La victime discrète, elle, peut l’oublier, son beau statut doublé d’une carrière, car il n’y a pas de victime sans public. En réalité, c’est le public enthousiaste, muni de mégaphones, hissant peut-être des pancartes encourageantes, qui fait naître la victime et lui assure son statut enviable en la transformant en son contraire. De l’ancienne crucifiée en actuel Christ-Roi unisexe, ressuscité en Pantocrator comme sur les icônes orthodoxes. La foule en liesse n’étant pas mon truc, l’orthodoxie m’angoissant, les martyres des autres accablant mon esprit primaire : si j’étais victime, je ne le dirais à personne, parce que les héros, je ne leur crois plus un mot dès qu’opportunément ils se mettent à se glorifier d’exploits subis. En matière de hauts faits, les seuls qui comptent, ce sont ceux qu’on a choisis, ce sont les prouesses volontaires. Ce ne sera pas en me violentant qu’on fera de moi un exemple de courage.
Dans le feu de l’action on peut ne rien entendre.
Pour pouvoir s’écrier : « Halte-là, bougre, pouce ! »
Il faut déjà être en position aigre-douce –
Sans consentement préalable, point d’esclandre.
La possibilité d’outrepasser l’éthique
Est la rançon de quelque entente antérieure.
Ainsi, ce vers si peu moral qu’il vous écœure
Paye le prix de ma licence poétique.
13 Janvier 2025